Pourquoi ?
- L’engagement. C’est l’époque ! « Ma bonne dame, les jeunes aujourd’hui ne sont plus engagés ! » Ce n’est sans doute pas faux. Mais pas sûr qu’ils l’aient été beaucoup plus avant. Toujours est-il que les membres de jurys, plus vieux que vous, ont tendance à penser que vous n’êtes pas assez engagés. Et pourtant l’engagement est révélateur d’une implication et donc d’une capacité d’action.
- L’analyse. Les opinions sont l’occasion de dévoiler vos capacités d’analyses, qui sont un des grands critères d’évaluation du jury. L’occasion, seulement l’occasion car ce n’est pas automatique : toutes les opinions ne s’appuient malheureusement pas sur de l’analyse. Pensez donc à mettre de l’analyse dans vos opinions !
- Le courage. Afficher des opinions, face à un jury que vous ne connaissez pas et qui surtout peut ne pas partager ces dernières, peut même lutter contre elles, est une sacrée marque de courage. Cela le sera encore plus si le jury vous porte la contradiction et que vous parvenez à maintenir votre point de vue.
- Le relationnel. Une opinion n’a pas grande valeur en soi. Elle prend sa valeur dans son partage avec des interlocuteurs. Le partage d’une opinion est l’opportunité pour le jury de juger de vos capacités relationnelles : pédagogie dans l’expression des idées, écoute, façon de faire face à la contradiction…
Vous comprenez dès lors combien l’expression d’opinions est une ressource précieuse en entretien, pour le jury : elle couvre presque tous les critères d’évaluation du candidat : l’action, l’analyse, le relationnel. Et donc un vecteur puissant pour gagner des points ; un vecteur pour en perdre un peu dans la plupart des entretiens, beaucoup dans certains (IEP, concours administratifs…).
Comment ?
- Affirmez clairement vos opinions
N’ayez pas peur d’affirmer vos opinions. Souvent, on ressent une hésitation des candidats dans l’affirmation de leur point de vue. « J’y vais, j’y vais pas ? » Si vous remplissez les conditions ci-dessous, vous n’avez rien à redouter.
Une opinion implique une prise de parti. Ne perdez pas votre énergie à essayer d’équilibrer les idées pour donner un point de vue moyen. Le « oui, mais » ou le « non, mais » a ses limites. Sachez affirmer « oui » ou « non ».
Exemple : Etes-vous pour une taxe Tobin sur les mouvements de capitaux ?
Mauvaise réponse : « C’est plutôt une bonne chose pour deux raisons […]. Et dans le même temps, ce n’est pas une bonne chose pour une raison simple. »
Bonne réponse : « Je suis pour, pour essentiellement deux raisons […].
Attention, manifester une opinion ne veut pas forcément dire s’inscrire dans une logique binaire. Une prise de position peut être complexe. Si vous voulez mettre de la mesure dans votre propos, utilisez le « oui sous condition » ou le « non sous condition ».
Bonne réponse : « Je suis pour, pour essentiellement deux raisons […]. Néanmoins, il faudra composer avec deux points importants, qu’il faudra prendre en compte. »
- Argumentez
Les opinions lapidaires, sans argumentation, n’ont aucune forme d’intérêt. Les opinions sont plus intéressantes du fait de la démonstration que du résultat. C’est votre cheminement qui intéresse le jury.
L’argumentation permet de fonder des avis qui ne sont pas toujours évidents de prime abord. Prenez donc le temps de structurer des réponses en deux ou trois points.
Ne vous restreignez pas, à quelques exceptions près. Presque toutes les opinions sont exprimables, à quelques exceptions près. Les personnes que vous avez face à vous ont la particularité d’appartenir, en général, à la catégorie des professions intellectuelles supérieures. Et en général, dans cette catégorie, les opinions sont plutôt mesurées, modérées, qu’elles soient de gauche ou de droite. C’est une première information. Et de manière générale, les opinions extrémistes sont rarement le fruit de la réflexion.
Exemples : les idées d’extrême droite, sexistes, machistes, racistes. Mais aussi les opinions non issues d’un raisonnement : croyances, dogmes.
- Acceptez la confrontation
Quand vous exprimez une opinion, vous devez vous attendre à une confrontation avec le jury. Cette confrontation peut être :
- Véritable. Le jury exprime sa réelle opinion, vous livre de vrais contre-arguments, issus de sa pensée.
- Fictive. Le jury joue un rôle. Il n’exprime pas sa réelle pensée. Il cherche à vous contredire et à vous pousser dans vos retranchements.
Il est très difficile pour vous de savoir si le jury joue un rôle ou pas. Mais cela n’a aucune espèce d’importance pour vous. Vous devez justement déconnecter les idées des personnes qui sont face à vous. Car tant que vous ne les déconnectez pas, vous êtes prisonniers de votre représentation du jury, celle d’une entité toute puissante. Or, vous devez être capable d’analyser ses arguments en toute sérénité et en pure objectivité.
Si le jury vous confronte à des contre-arguments, s’il vous dit que vos arguments ne sont pas bons, vous avez deux possibilités :
- Considérer que votre opinion est toujours la bonne. Les arguments donnés par le jury ne mettent pas en péril votre opinion. Mais il faudra argumenter, justifier votre maintien d’opinion.Ici vous gagnez des points par votre persévérance, par votre envie de convaincre, par votre sens de l’analyse (vous analysez que l’argument donné par le jury ne modifie pas votre point de vue).
- Considérer que les arguments du jury modifient votre opinion. Vous ne devez avoir aucune difficulté à changer votre point de vue si un argument du jury est en mesure d’agir sur votre position. Montrez en quoi l’argument qui vous est donné change en partie ou en totalité votre opinion.
Retenez que l’idée qu’il faut défendre à tout prix son point de vue est fausse. L’entêtement à défendre une mauvaise idée, la mauvaise foi ne feront que vous décrédibiliser. Mieux vaut vous appuyer sur un argument du jury que vous jugez pertinent pour avancer et du coup continuer à faire cheminer votre propre opinion. Car votre opinion modifiée, alimentée, est encore votre opinion. Vous pouvez même la considérer comme augmentée, meilleure car alimentée par un argument que vous estimez juste.
Dans les deux cas, le jury juge :
- Votre capacité d’écoute
- Votre capacité de raisonnement
S’il se trouve que vous pouvez y ajouter la persévérance et la conviction, en défendant votre opinion, du début jusqu’à la fin, alors tant mieux. Cette configuration est dans l’absolu la plus souhaitable. Mais elle repose sur une condition : que l’opinion que vous formuliez au tout début soit raisonnée et fondée.
Dans les deux cas, votre comportement doit être à l’écoute. Ecoutez le jury. Acceptez d’entendre sa position. Que vous vous rangiez ou non du côté de son opinion. Le jury jugera de cette écoute.
Dans les deux cas, le jury jugera votre capacité de raisonnement.