Oui, il s’agit bien d’une question du jury.
Cette question fait partie des questions très connes. Ou presque. Le jury est en train de se mettre sur la sellette et remet en cause la pertinence de sa fonction. C’est sacrément tordu. Ce qui sauve cette question des abîmes, c’est qu’elle peut révéler une prise de conscience par le jury de l’imperfection de son jugement. Et c’est vrai qu’en 30 minutes, on ne peut avoir qu’un jugement partiel. Trois réponses possibles, appuyées ici par des citations :
- 30 minutes sont suffisantes. « En 30 minutes, vous avez pu prendre le temps d’entrer dans mes expériences, de me questionner, de juger de leur consistance et de leur véracité. Le jugement n’est sans doute pas parfait, mais il me semble qu’en 30 minutes, vous avez pu recevoir suffisamment d’éléments concrets, factuels, pour juger sinon parfaitement, au moins correctement. »
Vous pouvez aller encore plus loin en insistant sur le fait que les 30 minutes ne sont que la face immergée : « Certes, vous m’aurez vu devant vous pendant 30 minutes, mais ces 30 minutes sont porteuses d’expériences professionnelles entre 1 mois et 3 mois, de pratiques sportives de plus de 10 ans, d’expériences associatives de plus de 4 ans et de recommandations d’un professeur et d’un professionnel qui m’ont suivis pendant plusieurs années. J’ai essayé en 30 minutes de vous détailler ces années. Donc c’est bien sur des années que vous aurez pu me juger et non en 30 minutes. »
« Qui juge lentement juge sûrement », Sophocle, Oedipe Roi
- En 30 minutes, ne peut s’exercer le jugement mais que les sentiments. On ne fait pas du jury un juge mais une entité passionnée, qui n’a le temps, dans une durée aussi courte, que d’avoir des coups de coeur ou des rejets. En 30 minutes, il est capable d’émotions, de ressenti, difficilement de jugement fini. « On ne peut juger quelqu’un en 30 minutes; on peut en 30 minutes ressentir des émotions, écouter son coeur ou son intuition. A mon avis, c’est ce qui peut se passer en 30 minutes et cela peut être suffisant pour choisir un candidat. »
« Si on aime, on prend le paquet, sans juger ! », Patrick Modiano
- En 30 minutes, on ne peut juger que par des apparences. Le propos est cynique. Mais il montre votre clairvoyance et que vous n’êtes pas dupe des limites de l’exercice.
« Que les apparences soient belles car on ne juge que par elles », Roger Bussy-Rabutin
Mais le jury peut alors vous charier : « Donc vous n’êtes qu’apparences, vous jouez un rôle ! ». Je vous renvoie alors à l’article dédié à cette question.