Pourquoi ?
- Comme les voyages, les séjours longs à l’étranger inspirent au jury de l’ouverture, de l’autonomie, de l’aventure. Encore faut-il assurer dans le discours pour véhiculer ces qualités. Dit autrement, les études à l’étranger ne sont pas suffisantes pour intéresser un jury ; il va falloir apporter du contenu.
- Les séjours à l’étranger sont de plus en plus vus comme un atout de première catégorie. Certains programmes exigent même que les candidats soient passés par une période longue, supérieure à 6 mois, pour pouvoir candidater. Dans tous les cas, ils constituent un avantage.
- Les séjours longs à l’étranger, du fait de l’immersion, sont de très bons supports pour apporter des contenus intéressants au jury. Car six mois, un an à l’étranger sont des durées longues qui vous ont permis de vivre des expériences consistantes.
- Les études à l’étranger sont un très bon moyen de voir comment, plongé dans un cadre nouveau (et le parallèle est facile pour le jury avec l’entrée dans le programme auquel vous postulez), vous apprenez ; ce que vous êtes capable de retenir d’une telle expérience. Si votre réponse est creuse, le jury, par transposition, pourra douter de l’apport, pour vous, de son programme.
Comment ?
Les erreurs à éviter
- Croire que votre séjour se suffit à lui-même
Il est fini le temps où partir à l’étranger faire ses études impressionnait les jurys ! La chose est si courante désormais que c’est plutôt l’absence de cette expérience qui suscite leur curiosité. Conséquence : ce n’est pas la simple évocation de votre semestre d’étude en Italie qui va satisfaire le jury. Il va falloir lui apporter du contenu, beaucoup de contenu, au même titre que pour les voyages, mais avec cette fois une exigence beaucoup plus forte.
- L’auberge espagnole
« J’ai vécu avec 4 autres étudiants d’autres nationalités, c’était super, il y avait une bonne entente, je me suis fait de vrais amis blabla… » L’auberge espagnole est sortie en 2002 et depuis, le jury a eu maintes fois l’occasion de se gaver de discours faciles et simplets sur l’ambiance géniale de la colocation. Cela ne suffit plus. Ca eut fait son effet il y a 15 ou 20 ans, plus maintenant. Parler de votre colocation, de l’atmosphère, c’est très bien, mais soyez précis, allez chercher des anecdotes, parlez de discussions que vous avez eues ensemble, d’activités précises que vous avez vécues ensemble etc. Le simple effet paillette « auberge espagnole » ne produit plus aucun effet devant le caractère commun de l’expérience.
- Les cours à l’étranger sont formidables
L’herbe est plus verte ailleurs, c’est bien connu. C’est vraiment l’impression que l’on a quand on écoute les candidats relatant leur expérience de cours à l’étranger. « Les professeurs sont joignables tout le temps », « Il y a une vraie interaction entre le prof et les étudiants », « Il n’y a pas cette distance qu’il y a en France entre les professeurs et les étudiants » etc etc. C’est sans doute juste. Mais c’est sans compter sur le fait que : 1. C’est d’une banalité affligeante ; il s’agit du sujet le plus spontané et courant évoqué par les candidats ; donc niveau d’intérêt du jury = proche de zéro. 2. C’est tellement banal que ça en devient cliché et quand on a passé une période longue dans un pays, il n’y a rien de plus décevant à livrer à un jury que des clichés. 3. Le jury est constitué de professeurs, français : ils ne seront pas froissés, sans doute, mais entendre que leurs collègues ailleurs sont plus cools qu’eux, sans démonstration particulière que c’est d’ailleurs mieux (c’est juste cool), ne met pas dans les meilleures dispositions.
- Les clichés
Déjà, en parlant de vos voyages, vous n’avez pas le droit de faire appel aux clichés. Mais quand vous avez vécu une longue période dans un pays, vous n’en avez strictement pas le droit. Bref, évoquer les pubs en Irlande, c’est juste interdit !
Ce qu’il faut faire
La structure de développement d’un long séjour à l’étranger est la même que celle d’un voyage. Je vous renvoie à cette partie pour plus de détail. Pour faire synthétique, nous avons besoin :
- D’une contextualisation (1 minute)
La contextualisation est essentielle comme pour toute expérience. Dans le cas d’un séjour d’étude, voici les éléments de contexte que l’on peut attendre :
- Le lieu : la ville, si elle n’est pas connue, la présenter : nombre d’habitants, situation géographique, spécialité économique, histoire…
- Votre logement : votre lieu d’habitation, vos conditions d’habitation, le quartier (ses caractéristiques), colocation ou pas
- Vos études : établissement fréquenté, cursus suivi, cours appréciés
Exemple : « J’ai étudié pendant 6 mois dans la ville de Coimbra au Portugal, de janvier à juin 2014. Coimbra se situe à 200 km au nord de Lisbonne, c’est une ville de taille moyenne de 200 000 habitants environ et qui a la particularité d’être une ville universitaire, l’une des plus anciennes d’Europe ; l’université de Coimbra est très connue. La ville est aussi un lieu important au Portugal puisque Coimbra était la capitale du Portugal avant Lisbonne. Je logeais en plein centre de Coimbra, tout près de la Bibliothèque Joanina, avec 3 autres étudiants, un Allemand, un Espagnol et un Anglais, dans un quartier somme toute assez calme. J’étudiais donc à l’université de Coimbra dans un cursus en Histoire européenne, qui est une des spécialités de l’université. J’ai eu l’occasion de suivre entre autre un cours d’histoire des religions époustouflant du professeur Schmidt ; d’autres cours m’ont beaucoup marqué comme celui traitant de l’idée européenne. »
- De focus sur des points précis et intéressants (2 x 1 minute)
Les focus sont des points dont vous allez parler au jury, pour l’intéresser et lui montrer que votre séjour a été riche, qu’il vous a nourri. Comme pour les voyages, les focus sont de deux ordres :
Les expériences
- Une rencontre : dans la rue, avec un professeur, avec un chanteur, avec un prêtre, avec une vieille dame…
« J’ai été frappé dans mon séjour par une rencontre avec une femme, évangéliste. Elle tenait un petit restaurant et c’est lors d’un déjeuner dans ce lieu que je l’ai rencontrée. En allant payer mon repas, j’ai remarqué, coincée entre la caisse et le mur, une Bible. J’ai posé une question sur cette Bible et j’ai enclenché une discussion de 3 heures sur la religion, cette religion. Partir longtemps à l’étranger permet de prendre le temps pour ce genre de rencontres et si vous me demandiez ce qui m’a le plus marqué de ce séjour, c’est cette rencontre : elle était spontanée et d’une incroyable richesse, simple et compliquée. Cette femme était une ancienne prostituée, elle buvait, se droguait. Et puis elle dit avoir rencontré Dieu et depuis elle mène une vie rangée. Moi, athée, j’ai essayé de comprendre ce qui l’animait. Cela a été difficile, nous nous sommes beaucoup accrochés, gentiment. Je me suis aperçu de deux choses. D’abord, même si cette femme avait tort sur certains points, évidents, qui ne peuvent relever de Dieu, j’ai senti qu’elle ne pouvait, qu’elle n’accepterait pas de dire qu’elle se trompe. Car si elle disait cela, cela mettait à mal sa croyance qui elle-même faisait tenir sa vie à peu près ordonnée. Et elle ne voulait pas retomber dans sa vie antérieure. Elle était forcée de croire. Ensuite, je me suis rendu compte que le Brésil devait profiter de cet élan évangéliste (15 % de la population) car il met de l’ordre, il tourne les gens vers le travail. Et je trouve intéressant ce sujet d’une religion qui contribue à la richesse d’un pays. »
- Un voyage dans le pays
« Ces 6 mois passés an Argentine m’ont permis de visiter un peu le pays. Je me suis déplacé en tout 4 fois dans le pays. Mais l’un de ces voyages m’a marqué. Nous avions entendu parler avec mes colocataires d’une station thermale dans les Andes, alimentée par la géothermie naturelle des Andes, à environ 1500 km de Buenos Aires. Nous avons loué une voiture à quatre et sommes partis à la recherche de cette station. Cela a été une découverte incroyable. Imaginez un petit village perché dans les Andes, au fond d’une cuvette accueillant jusqu’à 6 mètres de neige en hiver, avec des toits pentus comme je n’en n’avais jamais vu avant. La structure thermale avait quelque chose de très soviétique, des bâtiments défraichis, un béton et en tôle. Bref, un aspect très ancien. Et pourtant se trouvaient là-bas des boues magiques, dont profitent les Argentins car le lieu est connu, boues dont nous avons profité durant tout un week-end. C’était un lieu tout sauf touristique, aucun touriste n’aurait voulu venir là. Et pourtant, c’est bien ce lieu qui a retenu mon attention, bien loin devant des lieux a priori plus enthousiasmants comme la Péninsule de Valdes où l’on peut voir des baleines. Je crois que c’est la simplicité des lieux, le fait d’avoir eu l’impression de découvrir un lieu inaccessible qui m’a le plus plu. »
- Un cours qui vous a marqué
« J’ai été très marqué par un cours de philosophie. Je n’en avais jamais vécu, je dis bien « vécu » un comme celui-là. Il était assuré par le professeur Eliott, un vieux professeur apparemment en poste depuis très longtemps à l’université. Ce qui était le plus étonnant était que ce cours avait pour intitulé « Philosophie générale », donc apparemment un cours très standard. D’abord, sur la forme, j’étais habitué aux professeurs qui font cours ; là, j’avais un vieux monsieur qui vivait sa philosophie, expulsait des pensées, entrait en colère, s’apaisait puis repartait. Il fallait être présent environ 1 heure avant son cours pour espérer avoir une place assise. Tout le monde le savait : il y avait 45 places, pas une de plus ; ensuite une quinzaine de places debout, collées contre le mur. Ensuite, j’y ai découvert des philosophes comme Derrida, Deleuze, Foucault autour d’une question, celle du pouvoir qui ne se voit pas, de l’interstitiel, du tout petit, qui agit bien plus fort sur nous que n’importe quel pouvoir coercitif et armé. Cela m’a beaucoup travaillé et a inspiré directement mon mémoire de recherche un an plus tard, mémoire qui porte sur la notion de déchet chez Foucault. »
- Une discussion avec vos colocataires
- Une curiosité de la ville
- Une pratique, une activité
- Une activité associative
Le regard du voyageur éclairé
- Un point de la politique du pays
- Un point de l’économie du pays
- Un trait culturel, religieux sociologique du pays
Voir Comment traiter d’un voyage pour plus d’information sur cette partie.